Une fois n’est pas coutume, le B.A.R. invite un designer en ses murs, Alex herman qui propose un design certes épuré mais d’une grande sensibilité dans sa manière de nous inviter à le pratiquer, l’habiter. Du dessin en passant par la maquette, le prototype et la réalisation finale c’est toute une économie de moyens qui s’expose à nos sens…
« Il faut se garder de savoir. C’est le problème de toute activité artistique. Le cœur de la pratique doit conserver une sorte de noyau de méconnaissance totale, un petit trou noir autour duquel tournent les choses. Parce qu’il est tellement facile de bien faire les choses ! » Allan Pauls
Un minimalisme baroque
Chaque objet produit par Alex Herman est très épuré, nettoyé de ses anecdotes mais cependant il ne glisse jamais vers un système, une symétrie facile, un rythme répétitif. Toute production comporte une règle, une loi de progression, un « studium » et en même temps, un petit quelque chose de décalé, d’obtus qui empêche le prévisible : une pointe avancée ouvre l’objet équarri à la dimension organique de la ruche ou de la pomme de pin ; un basculement de l’angle droit opère un glissement, une dynamique donnant une vision équilibriste du carré posé sur sa pointe. Il y a de la perte de place mais quelle dynamique ! L’étagère Zaha tresse ses nervures en un réseau dense rappelant les circulations souterraines de nos métros. Les plans bifurquent, se croisent, se nouent sans se mêler. Leurs angles aigus se jouent de l’équerre rationnelle, en ouvrant sur une sensation de nervosité : l’étagère ne repose pas, elle décolle.
Une architecture domestique
« Toutes mes créations ressemblent à de petites architectures » Ettore Sottsass
Les objets sont conçus et compris par Alex Herman comme des objets d’architecture – sorte d’objets à habiter ou inversement, objets à ambition plus vaste. Il cite et évoque ouvertement la souplesse et la hardiesse des constructions de Zaha Hadid ou de Herzog et de Meuron. Curieusement, les habitations de Kazuyo Zejima ressemblent à s’y méprendre à certaines de ses étagères : barres métalliques peintes, soutenant le fragile verre, zigzaguant entre sol et ciel. Il n’est plus question uniquement de meuble mais d’édifice. Les enjeux n’ont plus les mêmes proportions. Le statut d’objet décolle doublement.
L’idéal concret
L’élaboration de chaque objet se fait selon des phases très ritualisées, révélant un besoin de palper concrètement et intellectuellement toutes les étapes. La première est celle de l’épure graphique : l’objet est pensé comme un dessin. Parfois, s’en suit une manipulation de papier plié. Puis un autre dessin – spatialisation virtuelle en trois dimensions – vérifie que l’objet se tient par sa ligne et son volume. Ensuite, une maquette à échelle réelle en bois blanc et carton brun créé une présence très concrète et bricolée de l’objet. L’ultime phase synthétise tous les processus d’approche en un objet solide, présent et, à la fois, lisse et en apesanteur, mêlant des matériaux très maitrisés tels que l’acier poli et peint ainsi que le bois laqué. On peut constater une économie de formes et de matériaux – Less is more – mais aussi une invitation au vertige d’un léger supplément – a little more than less. Une table composée de son plan et de ses pieds nomades s’ajuste en quelques gestes rustiques en une table pour enfant. Ici,le détail pratique et vivant donne la valeur essentielle à l’objet. Totalement démontée, la table se glisse et se laisse oublier contre le mur et devient, l’espace d’un instant, une installation abstraite mais concrète.
Nadine Taillouane
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Bureau d’Art et de Recherche
Lieu de cercle privé
ouvert du jeudi au samedi
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La QSP – 112, Av. Jean Lebas 59100 Roubaix – France
info.le.bar@free.fr – www.le-bar.fr
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> Musée La Piscine